LA 6L6... oui ! LA 6L6, comme LA CALLAS, car nous croyons qu'il s'agit bien d'une Diva dont la belle voix s'est fait entendre haut et fort... longtemps. Otto SCHADE, de la R.C.A. ne se doute pas du prodigieux développement du tube qu'il présente en 1936.
La demande est forte à ce moment pour donner du tonus aux étages de sortie des récepteurs de radio qui délivrent quelques maigres watts.
Nous ne reviendrons pas sur le fonctionnement du premier du genre de la grande famille des tubes à faisceaux dirigés (ou Beam Tubes des Américains) Paul BERCHE a parfaitement détaillé ses caractéristiques dans les éditions postérieures à 1936 de son fameux ouvrage.
Mentionnons seulement le fait que la charge d'espace existant entre écran et plaque, dans les tétrodes a faisceaux dirigés classiques, peut être remplacée par la présence d'une troisième grille, le suppresseur, qui bloque les électrons secondaires en retour de la plaque ; ceci est rappelé dans le manuel TT4 de R.C.A. (des orfèvres en la matière) sur les tubes d'émission.
Donc le terme "faisceaux dirigés" couvre diverses constructions, tétrode ou pentode, mais qui conservent le principe de base a savoir l'alignement des fils des grilles 1 et 2 pour avoir cette dernière "dans l'ombre" de la grille de commande, ceci vu depuis la cathode.
La formation du faisceau est complétée par les réflecteurs latéraux, en forme de V dans la 6L6, concentrant les électrons sur la plaque, et reliés à la cathode ; ce qui donne, sur certains lexiques de lampes des tétrodes qui deviennent, un peu vite, des pentodes.
Revenons à la 6L6 : sa forme cylindrique en métal noir est très caractéristique, bien qu'elle existe également dans l'habillage classique en verre plus anodin, plus ou moins renflé, des 6L6G-6L6GC etc.
Coté résultats ils sont à la hauteur des espoirs : de 4 watts en "single", on passe allégrement à 35 watts en push-pull classe AB1 avec, dans ce cas, seulement 2 % de distorsion totale, due exclusivement à l'harmonique trois puisque l'harmonique deux est supprimé par la configuration push-pull. De plus la 6L6, qui fonctionne sous des tensions plaque et écran raisonnables, se contente d'une tension d'attaque de grille nettement inférieure à celle exigée par les triodes de puissance.
Dès le départ, et durant près de cinquante ans, le succès sera assuré ; en effet les descendants directs de ce tube prennent la relève dans nombre de montages Haute Fidélité :
Jean HIRAGA, dans son "Initiation aux Amplis à Tubes", donne divers schémas de montages commerciaux, utilisant tous ces tubes, dont certains sont des "classiques" en HIFI.
La 6L6 aura une belle carrière dans d'autres emplois puisque, par exemple, on en trouve encore dans le générateur FERISOL C702 en 1964. La 6V6 sort au printemps 1937 : le principe est le même, seule la dissipation et la puissance utile sont réduites et s'accompagnent d'une réduction de taille. Ce tube deviendra les 6AQ5/12AQ5/6005 à l'arrivée de la série miniature sept broches, tout en conservant les mêmes performances. Pour ne pas en rester là, on sort la 807, plus puissante que la 6L6, dont la dissipation passe a 30 watts, et qui va trouver de nouvelles applications.
En basse fréquence il est possible de dépasser les 100 watts. (120 watts avec un push-pull classe AB2 sous 750 volts) et seulement une vingtaine de watts en montage "pseudo-triode" avec, en contre-partie, une distorsion ramenée aux alentours de 0,5%.
En ce début des années 90 il y a toujours une demande pour des amplificateurs HIFI utilisant ces tubes sur des réalisations semi-artisanales de haut de gamme dont le coût est très élevéle fameux "son tubes". Une utilisation particulière de la 807 sera l'amplification de puissance pour le balayage lignes des premiers téléviseurs : le lexique de lampes GAUDILLAT 1952 donne, pour SEUL exemple d'emploi, "amplification lignes". Elle sera également longtemps utilisée sur les matériels les plus divers, encore une fois par FERISOL en 1966 dans le générateur L308D.
Son emploi le plus courant sera toutefois celui de l'émission de petite puissance sur ondes courtes. Les deux livres d'Edouard CLIQUET, cités par ailleurs, abondent en schémas utilisant la 6L6, donc à petite puissance, aussi bien en oscillatrice qu'en multiplicatrice de fréquence.
La 807 lui emboîte le pas et délivre une cinquantaine de watts sur toutes les gammes d'ondes courtes, et notamment sur les bandes réservées aux Radio-Amateurs dont elle sera une des lampes favorites.
Ce tube est le précurseur d'une imposante branche des tubes a faisceaux dirigés qui se spécialisent dans l'amplification de puissance pour émission ; ceci toujours en raison de la très faible puissance nécessaire à l'excitation ainsi qu'aux tensions plaque et écran modérées pour un rendement global qui se compare favorablement avec celui des triodes de puissance.
Reprenant une publicité R.C.A de 1961 nous avons réunis, trente ans après, l'instant d'une photographie, divers membres de la famille :
En France nous trouvons divers tubes comparables :
Avant de clore le sujet des "beam tubes" il faut préciser que le principe n'est pas réservé aux tubes de forte puissance : la 5902 est également de la famille mais il s'agit d'un tube subminiature de la série SQ (Sécurité-Qualité) délivrant seulement 1 watt basse fréquence.
... LA 6L6 MONTE AU CIEL ...