23 - Triodes UHF -

QUO NON ASCENDET ? ...

La devise de FOUQUET peut également s'appliquer à la triode : jusqu'où ne montera t-elle pas ? ... La famille des tubes "acorn" flirte déjà avec les 1000 MHz, mais cela est insuffisant pour franchir nettement la frontière qui la sépare des UHF. Diverses études, débutées vers 1935, sont reprises et développées dans plusieurs pays, avec pour objectif la réalisation de Radars sur ondes décimétriques, voire centimétriques.

Deux voies de recherche sont prises simultanément : perfectionnement des tubes conventionnels... amélioration ou création de tubes utilisant des principes différents.

Commençons par les tubes classiques.

Il est évident que, pour monter nettement plus haut en fréquence, il faut perfectionner la technique mise en oeuvre pour les tubes "glands" : réduction des dimensions physiques pour diminuer le temps de transit des électrons entre cathode et plaque et minimiser les capacités parasites ; augmentation du nombre ou de la surface des connexions pour éliminer les inductances parasites. Le fruit définitif de ces recherches sort de la GENERAL ELECTRIC sous forme de la GL446 : Baptisée "Lighthouse", en raison de sa ressemblance avec les phares côtiers américains, cette triode est la première de la famille des tubes dits "à disques scellés".

Au centre de trois disques métalliques, montés parallèlement, on trouve :

Ces trois disques sont séparés par des anneaux de verre dans lesquels ils sont scellés, le tout monté sur un culot octal conventionnel.


triodes UHF

Si dans les tubes classiques les distances inter-électrodes se chiffrent en millimètres, en dixièmes dans les tubes glands, ici on approche les centièmes de millimètre.

Malgré cette proximité les capacités internes restent modérées en raison du petit diamètre de la partie active des électrodes (1,3 pF entre grille et plaque, 2 pF entre cathode et grille et 0,03 pF entre cathode et plaque) nous allons voir que ces capacités ne sont en fait pas vraiment gênantes. Du coté des inductances parasites cela devient totalement négligeable en raison de la grande surface des disques qui, de plus, sont argentés pour réduire les pertes et servent de liaison vers les circuits accordés coaxiaux.




C'est justement l'emploi de ce type de circuit accordé qui met le mieux en valeur les qualités du tube : les disques deviennent partie terminale, coté "chaud", des circuits dont les faibles capacités internes du tube ne provoquent qu'un raccourcissement modéré de la longueur (on utilise des circuits 1/4 ou 3/4 d'onde suivant la fréquence de travail). Dans ces conditions le fort coefficient de surtension inhérent à ces circuits est conservé, autorisant une bonne stabilité de fréquence en auto-oscillateur ou un gain appréciable en amplificateur.


2C40

La 2C40, identique à la GL446, grimpe allègrement à plus de 2000 MHz dans un montage dont le croquis donne une idée : 500 milliwatts à 2300 MHz ou 75 milliwatts à 33OO MHz sont obtenus avec seulement 250 volts plaque.

Si les fréquences atteintes autorisent l'emploi en réception Radar décimétrique (bande 10 cm/3000 MHz) la puissance atteinte est par contre nettement insuffisante du coté émission de la chaîne.

En augmentant quelque peu le diamètre de la plaque, la dissipation maximum passe de 6 à 12 watts dans la 2C43, largement utilisée en régime d'impulsions sous tension plaque de quelques milliers de volts. Dans ces conditions on obtient les centaines de watts suffisant au fonctionnement d'un radar à courte portée. Par exemple, dans la tourelle de queue du bombardier B29 on utilise un tube phare qui donne 500 watts sur 12 cm dans le Radar AN/APG15 de portée 1800 mètres. De nombreux autres tubes suivent avec des différences minimes : 2C42 - 2C46 etc. En effet le principe même du tube "phare" impose une disposition et des dimensions quasiment immuables, les tubes étant souvent interchangeables. La différence la plus sensible se trouve dans le courant de chauffage et la partie interne de l'anode, ceci permettant d'ailleurs de distinguer une 2C40 d'une 2C43, cette dernière étant sensiblement plus grosse. Dans la même famille on trouve la 2B22 diode également a structure plane, pour détection ou changement de fréquence dans la même gamme de fréquences. Ce tube est nettement moins répandu que les triodes, en raison notamment de l'arrivée des diodes hyperfréquences 1N21-1N23, très performantes, et dont la forme et les dimensions s'intègrent parfaitement dans la "plomberie" radar. Par contre la 2B22 (ou la TA4O TELEFUNKEN qui monte à 5000 MHz en mélangeur) résistent beaucoup mieux aux surcharges importantes. De très nombreux équipements, tant civils que militaires, utiliseront ces tubes ; nous nous bornerons à en citer deux : le récepteur de signaux radars APR-1 (ou AN/SPR-2) destiné à l'écoute des radars ennemis pour analyse et contre-mesures ; dans le tiroir CPR-46ACJ on emploie trois GL446 pour le radar ASB sur 4OO MHz. Enfin le générateur VHF GENERAL RADIO 1208 couvrant, en une seule gamme au moyen d'un circuit "papillon", de 65 à 500 MHz avec une 2C40 (FERISOL fera de même...).

Les tubes phares seront encore améliorés pour atteindre 4000 MHz où une 8108 ou EC157 PHILIPS présentent un gain de 13 dB sur les petits signaux, tout en étant capables de sortir au moins 1,5 watt avec encore un gain de 8 dB... Une particularité de ces tubes réside dans le filetage du diamètre extérieur du disque de grille, au pas de 32 filets au pouce, système Sellers... réminiscence de l'origine américaine de la famille de ces tubes... ? ... Légèrement plus puissante la EC158 offre un gain de 11 dB dans les mêmes conditions, mais monte à 5 watts toujours pour 8 dB de gain. Ce tube est également pourvu d'un disque de grille fileté ; à noter sa dissipation plaque maximale qui monte a 30 watts.





tubes hyperfréquences




A propos de dissipation... c'est justement une des limitations des tubes "phares" conventionnels, puisque l'encombrant culot octal est nécessairement situé en partie externe des circuits coaxiaux, la plaque se trouve enfouie à l'intérieur de deux ou trois tubes métalliques avec une mauvaise évacuation des calories, affluant jusqu'au moment où il y a risque de fêlure des isolements verre. La solution consiste a renverser l'étagement des éléments du tube : l'anneau de l'anode, de gros diamètre, en haut ; celui, moyen, de la grille au milieu, pour terminer par les liaisons au filament, devenues coaxiales, la cathode reliée au tube externe. Le tout, surmonté de disques de refroidissement par air forcé, donne la 2C39 qui dispose d'une dissipation plaque de 100 watts.


2C39 ...


La 2C39 et ses soeurs, L.M.T - PHILIPS et compagnie

Dans cette présentation le tube est descendu dans les circuits coaxiaux en débutant par les connexions du filament avec, au final, ses ailettes de refroidissement au sommet des circuits accordés. Cette fois il est facile de refroidir le tube dont les ailettes émergent des circuits coaxiaux... on peut donc le pousser nettement plus.

Si ce tube est bien de la famille des disques scellés, il ne fait plus partie des tubes "phares" auxquels certains le rattachent abusivement. Les Américains l'appellent le plus souvent "oil can" ; sans doute par analogie avec la burette à huile des anciennes machines à coudre avec laquelle il a une vague ressemblance. Nous pensons également aux systèmes de lubrification des vieilles machines outils, telles que les tours, dans lesquels les paliers de l'arbre principal étaient surmontés de petits réservoirs ayant l'aspect de la 2C39... ? ... De mémoire, il nous semble que le terme "oil can" pour la 2C39 est apparu pour la première fois dans "Radars Beacons" de la collection du M.I.T. Voir également la page 163 du volume 7 de la même série... Quoi qu'il en soit un pas en avant est franchi dans le domaine de la puissance : sortant une vingtaine de watts à 2500 MHz sous 800 volts plaque, il s'utilise aussi très bien en impulsions où il délivre plusieurs kilowatts sous des tensions atteignant 3000 volts.

Nous l'avons personnellement utilisé, avec des impulsions d'une microseconde pour la première liaison "Amateur" France-Angleterre sur 2300 MHz. Il est à noter qu'il convient de réduire la tension appliquée au filament à mesure que la puissance, donc le courant, traversant le tube contribue à l'échauffement de la cathode : on a seulement 4,8 volts (au lieu du 6,3 volts nominal) à 2500 MHz pour 100 mA plaque sous 600 volts, sortie 21 watts HF.

Dans son livre "Les Hyperfréquences" (collection du C.N.E.T.) J. VOGE donne de bons exemples de ces tubes en version Américaine, Anglaise, Allemande, voire Russe...




Comme pour ses soeurs ainées la 2C39 aura de nombreux descendants qui diffèrent très peu du modèle d'origine : ML322 (Machlett Laboratories)... 3852A (L.C.T./L.M.T.).

La différence la plus notable est la version céramique des isolements : 7289.

La photographie précédente montre quelques tubes de cette famille à laquelle appartient également la grosse LD7 Allemande déjà mentionnée. A nouveau la 2C39 est largement utilisée dans divers équipements annexes des Radars, par exemple les I.F.F AN/UPX-6 dans la gamme 990-1130 MHz qui seront fabriqués en très grand nombre.


cavité 2C39

Le montage d'une 2C39 dans une cavité ré-entrante, suivant croquis ci-dessus, est un exemple... à ne pas suivre de trop près. En effet dans ce cas précis les ailettes de plaque sont particulièrement mal ventilées ce qui restreint l'emploi du tube à des applications de petite puissance, ici un oscillateur local de récepteur 2300 MHz... néanmoins muni d'un petit ventilateur...




La famille comporte, toujours sur la base des disques scellés, des modèles d'aspect légèrement différent, de faible puissance car démunis de radiateurs. De plus petit diamètre extérieur et également dépourvus du support octal ils sont plus aptes à l'incorporation dans de petits circuits coaxiaux. La triode SYLVANIA RT434 est typique de cette présentation avec ses larges anneaux de plaque et de grille ainsi que l'arrivée coaxiale filament/cathode.

La EC55 est de caractéristiques voisines, tout comme la R243/6010. Coté diode on trouve la 2-01 EIMAC miniature, ou encore la EA52 MINIWATT plus spécialement destinée à la mesure des tensions VHF (jusqu'à 1000 MHz) dans les têtes des voltmètres électroniques.

Rappelons toutefois, pour relativiser, que la LG1 Allemande, bien que de structure conventionnelle, est donnée comme encore "utilisable" à 3000 MHz Le principe des disques scellés est ensuite appliqué à d'autres tubes, miniatures ou de taille normale.


autres triodes UHF


Tubes à disques scellés de petites dimensions.

triodes R243/6010 et R434 et diodes 2-01 et EA52

Toujours dans les petites triodes nous trouvons F7002 et 7077, toutes deux de la C.S.F. leurs disques étant isolés par de la céramique. Ces tubes sont de très petite taille (voir photographie) et s'intègrent bien dans des émetteurs récepteurs VHF/UHF d'aviation de dimensions de plus en plus restreintes. Du coté des tubes de taille habituelle on trouve la triode TBL 2-300 PHILIPS, qui peut dissiper 300 watts par air forcé dans les ailettes entourant l'anode, et donne 500 watts à 150 MHz. Elle est encore utilisable a 900 MHz à puissance réduite.


petites triodes

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